Galerie collective des peintres Versant L'Autre (E.T.)
Nora Lubanovic Evetovic
Emêlée dans la brume
Camille Sauton
Les humains aquatiques
*À paraître dans le revulivre Travail sur le deuil d'Iren Mihaylova et de Camille Sauton en octobre chez Peau Électrique, présentation au salon de la revue et signatures du 1O au 12 octobre.

Franco-anglaise, Camille Sauton a grandi à Paris tout en ayant accès depuis l’enfance à la campagne cornouaillaise et à l’approche esthétique des jardins anglais par sa grand-père horticulteur. Anciennement géologue cartographe et marin, elle puise dans ces expériences pour dessiner les humains aquatiques à la calame et à l’encre bleu de phtalo.
Iren Mihaylova - photographie
« Pour peindre une rose »
« Il n'y a rien de plus difficile pour un peintre vraiment créatif que de peindre une rose, car avant de pouvoir le faire, il doit d'abord oublier toutes les roses qui ont jamais été peintes. »
Henri Matisse

Jennifer Grousselas
L'oeil interne de la nuit
« L’image dans l’image « se colle » dans un sillage à l’instar de l’image des papiers découpés tant précieux pour Matisse. l’on observe chez Grousselas le surgissement de corps, de visages marqués, des yeux ! du vide coloré. Toutes ces images sur une seule toile mais sans aucune interaction. Elles pourraient parfaitement exister séparément comme dans un ensemble, où une distante froideur du masque introduite par les visages-masqués ou visages-masques nous indique que ce que nous voulions percer n’est pas l’essence. Ce que l'on comprend ici, c’est qu’on doit se fier aux masques. »
- Extrait d'un article d' Iren Mihaylova sur Fixation d'un vertige de Jennifer Grousselas, Éditions sans escale.
Sarah Mostrel - magicienne des ombres
« Pour être un artiste, vous devez encourager les choses que la plupart des gens négligent. »
- Citation anonyme
« Ce que j'aime, dans l'art photographique, c'est capter le mouvement, la lumière, le moment propice où dans le choix d'un angle de vue, la chose figée parlera le plus possible à la mesure de sa réalité, ou de l'imaginaire... Même s’il est impossible de rétablir les parfums qui s’exhalent, se libèrent, et de retranscrire par ce biais (ou quelque autre d’ailleurs) une atmosphère, un lieu, les bruits des alentours, le climat environnant, en bref, d’initier la création, ce moyen d’expression, quand il est juste, éblouit par sa loyauté, son instantanéité pertinente. L’ombre et la lumière du cliché - personnage flashé ou paysage capté - nous raconte l’histoire de l’homme, son interaction avec l’Autre, avec la nature, avec la rue. Osmose de cette précieuse rencontre entre l’objet photographié et l’immortaliseur d’images (spectateur, voyeur ou artiste) qui, sous couvert de l’objet, cherche lui aussi à être éternel. En figeant la vie dans son immédiateté, le photographe ne crie-t-il pas son éternité ? Témoin du monde, c’est dans la tentative de s’y mêler qu’avec distance ou plan rapproché, il appuie sur la gâchette de son instrument, consécutivement, intempestivement, souvent en transe, dans l’espoir d’être le plus sincère, le plus proche de D-ieu peut-être… L’esthétique le transportant, il s’y fond pour mieux appréhender l’univers soudainement élargi grâce à l’ensemble des possibles qu’il a réunis là, dans une reproduction qui ne sera cependant qu’une mince interprétation, figuration, imagination, infime réalité, tant infinies sont les couleurs, les angles, les visions, les regards et les instants changeant en permanence à chaque plus petite portion de seconde perceptible par notre cerveau… »
- Sarah Mostrel, extrait d'Analogie d’une réflexion
Jacques Cauda
Sur la peinture
La peau tendre châssis
Il s’agit de peinture, avant toute chose et surtout après toute chose et pendant toute
chose. De peinture et de voir sans idée préconçue. De voir en peignant, comme
Courbet voyait dans l’acte même de peindre. En conséquence, il faut se mettre tout en
entier à la place de l’œil afin de voir le voir, avec la vérité dans le blanc de la main.
Mobile du blanc
Qui porte une distance
Une sorte de fin de règne
Qui rend tout tracé
Noir dans l’image
Pictura loquens
La peinture réunit dans le même geste l’irréconciliable rapprochement qu’il y a entre
le désir et la haine du désir.
Ne peindre que la peau, c’est se délivrer des clefs qui ouvrent la représentation. C’est
redonner une surface au monde par le trou que fait la peinture dans l’image que le réel a
pris pour seul modèle, et à qui elle se substitue. La peau se tient à mi-chemin du visible
et de l’invisible, précisément là où rêve le crime.
Le portrait nous montre les mots que nous sommes devenus. Peindre la peau d’un
visage est à entendre comme une vocalisation.
Avec le geste de peindre ou de tuer, ce n’est pas le fait de produire ou de détruire de
l’être qui est unique, c’est la manière de le faire. L’être produit par le peintre est
univoque avec l’être détruit par les effets de la peinture.
La transmutation de la peau en peinture est davantage fondée lorsque le thème
transformé entretient quelques équivalences avec celui en lequel on le transforme, et il
se trouve ainsi comme sous deux lumières.
Écrire sur la peinture, c’est aussi s’en faire regarder, car « c’est l’œil, dit Edmond Jabès,
qui déclenche le vrai questionnement, l’interrogation des mille interrogations qui
sommeillent dans la lettre » sous les traits d’un regard assassin.
Peindre c’est donner à la mort une peinture du dedans dissoute dans la couleur et la
lumière.
La peau existe à fleur de lin
Dans le plan de l’aire sélective
Que montre toute nudité
Qui s’en dégage
Comme horreur sacrée
Ô l’éclat évanescent
C’est la peau
À l’heure de la peinture
Encore soufflant les noirs et les blancs
C’est la peau
Amie des feuilles
Où s’ébattent les mains
En un instant
C’est la peau
À l’endroit
Du temps
C’est la peau
Tendre châssis quand
C’est fini
Texte et peinture - Jacques Cauda

Forêts Intérieures
Sébastien Souhaité, auteur du revulivre Aucune fleur ne compte, poèmes sur l'absence, Peau Electrique, livre d'art et de poésie, 2025.
un poème taillé à la serpe
au couteau
pour dire le bleu vidé de sa couleur
le soleil vague de sa lumière
pauvre guerre à mener
comme si rien l’absence
à l’arrière-plan de vivre montagne immobile
le châtaigner
les hortensias
et la peur que s’évanouisse
que se consume
se noie
le souvenir
qu’aimer se désagrège