« L’amour, c’est donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas »
– Jaques Lacan
Une pareille imagination est si rare
Même serrée entre les mains
Le soleil penché sur nos fronts
Et on lamente « le soin »
Tel qu’on entame à l’intérieur
Et nos bras nus qui sont la bêche
La lune – ce soir tamisée à nouveau
Sur son sabre se balancent des Bédouins
Chagrinées nos phrases se récurent
L’une contre l’autre et l’un envers l’autre
Jusqu’à l’aube je soliloquais
Sur le sens de l’existence et de l’amour
Or, enfin très peu il importait
Que les lampadaires en nous s’éteignent
Le fait qu’on s’était jadis aimés est un avis
Et les avis ne peuvent pas te consoler
Ils se forment lorsque mon cœur jaillit
Sous la croute des plaques tectoniques
Les lampadaires s’éteignent dans le ciel ainsi que
dans les ténèbres
Et à l’aube tes mots deviennent amers
Quand elle aura fini avec moi répandez mes restes
Et sur ma tombe en minuscules engravez :
« Je n’ai connu ni les océans, ni les côtes de la mer
Mais je les ai créés au bord de tes lèvres aimées. »
***
Les matelots écrivent dans un océan lointain
Les mémoires d’un étranger, sous ma dictée
J’imagine et je rêvasse les aventures d’un autre
Hélas, je ne retourne pas vêtu d’un manteau doré…
…
Étranger à moi-même je passe
À travers des mers froides et argentées
Tes appels coloraient cette onde grave
Pour la dernière fois je suis sa trace.
***
Cet artifice antique m’est si familier –
Tu t’absentes et moi je t’aime
Le résultat candide m’est si familier
Et la bonté payée en échéances
Ni lèvres, ni cellules ne se recolleront
A travers les armures froides et moroses.
Le destin est une actrice douée, sans aucun doute
Mais je ne pourrais pas la saluer
Cette providence vaste comme une route paysanne
ne mène pas toujours aux tranchées, je le sais.
Dans un avenir prometteur la Terra sera labourée
Et lors d’un ajournement miraculeux
L’homme comme ultime bataillon
Altérera chaque tranchée en papillon.
Cet artifice antique m’est si familier –
Vivre après avoir déjà aimé.
Textes : Georgi Slavov
Traduits du bulgare par Iren Mihaylova
Peinture : Le travail de la rêveuse, acrylique sur toile, 2023.
Pour découvrir plus de textes de Georgi Slavov et de textes et d'illustrations d'Iren Mihaylova, rendez-vous sur les pages du premier numéro de la revue Peau Electrique en format papier.
Pour découvrir le travail de peinture d'Iren Mihaylova, rendez-vous sur le site, dans la section « L'Univers Visuel ».
Georgi Slavov est un poète, journaliste et musicien bulgare. Diplômé en philologie et en langue anglaise, il étudie actuellement la sociologie. Il est l’auteur de trois recueils de poésie. En 2020, il a remporté un concours de traduction organisé par l’université de Sofia. En 2021, il est nommé pour un prix littéraire national.
Ses poèmes sont traduits en anglais, russe, serbe, bosniaque, espagnol, portugais et français. Traduit de l’anglais et du français.
Passionné par la musique, il joue de la guitare, de la basse et de la batterie.
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